Sébastien Christophe, une histoire d'or




Comme un orpailleur à la recherche d’un filon, Sébastien Christophe a passé son enfance à fouiller dans les terres de la ferme familiale. Il a trouvé dans le terroir le moyen de transformer les grains de blé en éclats dorés. Un Chablis qui est aujourd’hui servi Place Vendôme, au cœur du quartier des bijoutiers à Paris.



Comme Benjamin Pavard, il vient de nulle part. Parti de rien, ou presque. A peine soixante ares de vignes pour son premier millésime en 1999. Sébastien Christophe s’est lancé comme le fan qu’il est du groupe rock Marcel et son orchestre, en faisant du stage diving. Il a sauté dans le vide sans aucune référence. Ses parents étaient céréaliers. Ils ne pouvaient pas vraiment l’aider. Tout était à faire. En sortant de l’école à Beaune, il aurait pu faire le tour du nouveau monde, comme bon nombre de ses collègues. Une grande maison de Chablis lui avait proposé le Chili. Il n’avait pas le temps. Il avait son sillon à creuser.



Un bon filon

Sébastien Christophe aime citer le grand Winston Churchill. « La chance n’existe pas. Ce que vous appelez chance, c’est l’attention aux détails ». Deux étoiles au guide Hachette dès son premier millésime, le coup de cœur l’année suivante : il avait trouvé le bon filon. En une vingtaine d’années, il est passé des « grains qui ne supportaient pas grand-chose à du vin qui apporte beaucoup de chose ».  Son domaine s’étendra bientôt sur une trentaine d’hectares. Son millésime 2018 était pratiquement déjà tout vendu sur précommande dès la fin de vendanges pourtant abondantes. 

Ses terres, Sébastien Christophe les connaît par cœur. Enfant, il a souvent creusé le sol de ses mains, à quatre pattes dans les champs de la ferme centenaire, à la recherche de belles ammonites et de plaques de kimméridgien. Ces petites huîtres fossilisées qui apportent au Chablis sa précieuse minéralité. Pour le blé, en revanche, difficile de retrouver dans la farine la trace du terroir. « Quand tu vois les rendements du blé sur ces sols, tu te rends compte qu’il vaut mieux faire de la vigne », rigole-t-il, en vous entraînant sur le chemin de Compostelle qui traverse ses parcelles de Petit Chablis.

Comme Aladin

Pour l’élaboration de ses vins, Sébastien Christophe se prend pour Aladin. Il demande « à l’esprit du terroir de sortir de la bouteille », comme s’il y avait enfermé pendant des années le génie de la minéralité avec un bouchon. Il poursuit la plus pure expression d’un terroir qu’il connaît comme le fond de ses poches. Il s’est imposé une règle : « garder toujours la même vinification pour mieux conserver la mémoire du vin ». Chaque millésime exprime ainsi ses différences sans complexe. « C’est tout le contraire de l’œnologie moderne ». Le millésime 2014 a comblé ce chercheur d’éclats de pureté. « Il me rappelle les Chablis que l’on goûtait au début des années 1980, avec ce terroir qui ressort ».

Sébastien Christophe est amateur de rock pur et dur. Il veut que ses vins conservent leur expression comme Nirvana, groupe capable de garder toute son authenticité, même en débranchant ses amplis pour un concert umplugged. Même s’il élève 20% de ses premiers crus en fût de chêne (Fourchaume, Mont de Milieu et Montée de Tonnerre), il veut garder la tension du Chablis. « Avec le bois, il faut y aller avec parcimonie ». Tiens, il parle de « fondre le goût boisé dans le vin », comme on fond de l’or pour en faire des bijoux.


Une angoisse de Bourguignon

Il a l’air cool, Sébastien Christophe, mais son calme cache beaucoup d’angoisses. Lorsqu’il s’est lancé, il redoutait ce que deviendraient ses vins quinze années plus tard. C’est bien une angoisse de Bourguignon que de se demander si le génie du terroir sortira encore de la bouteille des dizaines d’années plus tard. « Réussir la vinification, c’est un truc de dingue », confie-t-il.

Pas surprenant que son vin se retrouve parmi les références de l’hôtel Ritz, place Vendôme.  Sa cheffe sommelière, Estelle Touzet, cherche des « jeunes pépites », a-t-elle confié au magazine 12°5. Des pépites… Encore une histoire d’or.

Par Antonio Rodriguez @Chablisnews

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